Intervention du Dr Sandrine Mestre Godin lors de la journée "Autour du lymphoedeme" 2022

Intervention du Dr Sandrine Mestre Godin lors de la journée "Autour du lymphoedeme" 2022

Intervention du Dr Sandrine Mestre Godin lors de la journée lymphoedeme 2022

Sandrine MESTRE GODIN, Médecin vasculaire dans l’Unité de Lymphologie, Service de Médecine Vasculaire au CHU de Montpellier, centre de référence du lymphœdème primaire.


La chirurgie du lymphœdème :

Nous avons tous un capital lymphatique différent à la naissance.
Le lymphœdème primaire peut apparaitre à différents moments de la vie.
Les tableaux cliniques sont très différents, le tissu lymphatique est (2 possibilités) :
-    Soit, les patients ont peu de ganglions lymphatiques et/ou peu de ganglions fonctionnels (hypoplasique),
-    Soit les patients ont trop de vaisseaux lymphatiques qui en plus fonctionnent mal ou sont non fonctionnel.
Dans les 2 cas, cela crée un problème de drainage naturel de la lymphe qui s’accumule, c’est le lymphœdème.
Le lymphœdème secondaire apparait à la suite d’un traumatisme dû à une intervention/un traitement (radiothérapie par exemple) qui induit une anomalie de drainage lymphatique.

Le lymphœdème est une accumulation de lymphe dans l’espace interstitiel et cela va créer une inflammation des tissus qui se modifie plus ou moins rapidement avec le temps.
Une chirurgie complémentaire, va travailler ces tissus, notamment avec la lipoaspiration de tissus graisseux dans l’espace hypodermique.


Traitement du lymphœdème :

1 – 1er traitement du lymphœdème : le traitement médical décongestif
Le 1er traitement du lymphœdème est une physiothérapie décongestive en fonction du stade du lymphœdème (soins de la peau, drainage lymphatique manuel, bandages, activités sportives et contrôle du poids). Ce traitement se fait dans le cadre d’une hospitalisation conventionnelle ou en ambulatoire et dépend du stade du lymphœdème.

Au CHU de Montpellier, on hospitalise aux stades 2b et 3. Pour les autres stades, c’est une consultation.

Stade 1 : lymphœdème fluctuant  prise en charge en consultation et suivi.
Stade 2 : lymphœdème permanent avec différents stades tissulaires (2a : peau souple, 2b : peau épaissie)  prise en charge en consultation pour le stade 2a, traitement intensif pour le stade 2b en fonction de l’évolution sous traitement ambulatoire bien conduit.
Stade 3 : déformation du membre très marqué  traitement intensif puis relais avec prise en charge ambulatoire à la maison.

Cette hospitalisation se fait sur 5 jours pour 99% des patients, en hospitalisation conventionnelle (moins fréquent), en hospitalisation de jour ou en hospitalisation de semaine. Après avoir bénéficier de l’expérimentation Hôtel Patient au niveau national, cette prise en charge est pérenne. Les patients dorment à l’hôtel (pris en charge par l’hôpital) quand ils n’ont pas besoin de surveillance de nuit (hôtel-patients).

2 – phase de maintien : la 2ème phase consiste en une phase de maintien alliant soin de la peau, port de compression diurne / nocturne, réalisation régulière d’auto bandages, drainage lymphatique manuel et bandages réducteurs avec un kinésithérapeute formé, activités sportives et contrôle du poids qui va être adapté en fonction des patients.

On ne prend en charge les patients en chirurgie complémentaire qu’une fois tous les traitements médicaux optimisés et qu’on ne peut aller plus loin dans la réduction du volume, que le poids est stable et le patient bien au clair sur la prise en charge post opératoire et au long cours après la chirurgie. Il n’y a pas de traitement curatif (qui guérisse définitivement) du lymphœdème.


Différentes modalités chirurgicales :

1 - Chirurgie dite « curative » (mais les études ne permettent pas de montrer que la chirurgie guérit du lymphœdème) :
-    Chirurgie par transfert de ganglionnaire. : cette chirurgie se pratique au niveau national et international.
Elle consiste en un transfert sans revascularisation d’un ganglion prélevé sur en endroit « sain » mais n’a pas montré ses preuves, même si cela fait plus de 20 ans qu’elle est pratiquée...
Complication possible : lymphœdème du site donneur. Balance bénéfice risque mauvaise
-    Chirurgie reconstructrice avec lambeau + greffe ganglionnaire dans le même temps : On prélève cette fois des ganglions vascularisés et anastomosé (rebranché) au niveau lymphatique (dans le cadre du cancer du sein par exemple). Dans les études, pas assez d’informations, pas de prise en compte sur le long terme, et ne prend pas en compte les traitements associés qui font partie du résultat.
-    Anastomose lymphatico-veineuse : on ne touche pas aux ganglions mais on branche un vaisseau lymphatique band un vaisseau veineux et on se dit que la veine va aider au drainage (améliorée le débit). Première vague de cette technique il y a 30 ans : cela n’a pas fonctionné. Avec progrès de la microchirurgie qui permet une très grande précision, les anastomose se font à nouveau. Les études portent sur un nombre limité de patients chacune, avec des prises en charge différentes difficile à comparer, nécessite des études objectives à grande échelle avec des critères bien définis.
-    Technique LYMPHA : les équipes Italiennes ont commencé il y a 10 ans. La nouveauté est que, dans le cadre de la chirurgie du cancer du sein, une première équipe fait la chirurgie du cancer, et dans le même temps (cela rallonge le temps du bloc), une autre équipe, en général des chirurgiens plasticiens, va venir faire tout de suite des anastomoses lymphatico-veineuses avant tout autre traitement. La pré-étude italienne montre qu’il n’y a plus que 4% de lymphœdème contrairement aux 7% avec le ganglion sentinelle. C’est encourageant. D’autres équipes au niveau international travaille sur ce sujet avec des résultats positifs également.
Au CHU de Montpellier, les chirurgiens se sont équipés et formés, un travail commun va être mis en place pour évaluer cette technique.


2 - Chirurgie palliative :


But de la chirurgie à visée palliative : traiter les symptômes fonctionnels invalidants

-    Chirurgie de résection : avulsion cutanéo-graisseuse
Charles (1912), puis Servelle (1986) ont pratiqué cette chirurgie très invasive qui consiste en une exérèse de la peau et des tissus sous cutanés (sous la peau) pour enlever le lymphœdème puis faire ensuite une greffe de peau. Cette technique est abandonnée de nos jours dans les pays développés. Les résultats étaient inesthétiques, entrainant une gênes fonctionnelle importante, avec beaucoup de complications, notamment liées à la greffe de peau, des hospitalisation trés longue.
Elle est restée la seule alternative chirurgicale pendant très longtemps.
Balance bénéfice risque très mauvaise. Trop de complications lors de la phase de cicatrisation, très souvent invalidante sur le long cours.
Quasi abandonnée au niveau international.

-    Chirurgie par micro lipoaspiration : pour diminuer le volume du membre et améliorer la qualité de vie. Chirurgie envisagée sur un lymphœdème avec une prise en charge optimale au quotidien et sur un membre stable avec un poids stable.
Ne modifie pas la prise en charge habituelle qui doit rester optimale surtout après la chirurgie.
Gestion post opératoire intensive : auto bandages à maintenir de 1 à 3 mois en fonction de l’œdème, de la douleur et la souplesse cutanée.
Cette chirurgie existe depuis de nombreuses années mais ne donne pas des résultats optimums sans une prise en charge quotidienne du lymphœdème car le système lymphatique défaillant reste le même.

-    Chirurgie des excès cutanés ou dermolipectomie : quand il y a une grosse perte de volume, il peut y avoir un excédent de peau invalidant (pour se mouvoir, s’habiller, porter sa compression) qui ne peut s’enlever que par un acte chirurgical.

-    Chirurgie des organes génitaux externes : collaboration entre le chirurgien plasticien, l’urologue ou le gynécologue, et l’équipe de lymphologie. Lorsque le volume est trop invalidant et/ou papillomatoses accessibles à la chirurgie.
Réduction des bourses, des lèvres.
Greffe cutanée du fourreau de la verge si besoin.

-    Chirurgie d’exérèse de la papillomatose invalidante : cette chirurgie intervient si le traitement médical bien conduit ne marche pas, s’il y a une gêne au chaussage pour les orteils, et enfin s’il y a une gêne invalidante ou un écoulement pour les organes génitaux.

Dans tous ces cas, la chirurgie du lymphœdème doit faire partie d’une prise en charge globale dans un centre spécialisé en association avec une équipe de Lymphologie.

Toute autre chirurgie comme la pose d’une prothèse de genou ou une opération de l’épaule est possible sur un membre atteint de lymphœdème, un protocole de prise en charge de l’œdème doit être mis en place pour faciliter la gestion de l’œdème en post opératoire.


Conclusion :


-    La chirurgie peut être un complément dans la prise en charge du lymphœdème pour certains patients
-    Uniquement après un traitement médical bien conduit, optimal et une évaluation/suivi pluridisciplinaire.
-    Protocole personnalisé
-    Période d’auto-bandages quotidiens longue (3 mois voire plus)
-    Gestion en auto soins
-    Pas de traitement curatif, il faut poursuivre le port de compression et les soins au quotidien après le complément chirurgical

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